L’application Qui Livre Tout
Le parcours de Glovo, c’est un peu l’antithèse de la start-up européenne. Habituellement, les jeunes pousses naissent plutôt dans le nord de l’Europe (y compris en France), pour attaquer ensuite les marchés du Sud. Cette fois, c’est le contraire.
L’entreprise de livraison, qui devrait cumuler deux millions de commandes en 2017, est sortie de terre en Espagne pour s’implanter ensuite plus au nord. Et avec 30 millions d’euros récoltés notamment auprès de Cathay Innovation et Rakuten Capital, la start-up ibérique devrait accélérer rapidement son expansion continentale. A commencer par la France.
Ce territoire, ouvert depuis juin 2016, est crucial pour le développement de Glovo, comme l’explique son fondateur, Oscar Pierre : « C’est le marché où l’on enregistre la plus forte croissance. Nous sommes sur une tendance d’entre 25 et 30 % par mois, et les Français sont plus matures dans leur utilisation de notre service. » Si Glovo est largement exploité en Espagne et en Italie pour des livraisons de courses de nourriture, la proportion des commandes non alimentaires est plus importante dans l’Hexagone. « Ils peuvent commander des fleurs, des médicaments, ou même des clefs… », précise le jeune fondateur, âgé seulement de vingt-cinq ans.
Une douzaine de villes espagnoles avant fin 2017
C’est en allant aux Etats-Unis effectuer sa dernière année d’étude universitaire que le Barcelonais a eu l’idée de Glovo, qui s’inspire des modèles d’applications de service à la demande comme Airbnb et Uber. A son retour en Catalogne, il rencontre Sacha Michaud, avec qui il crée l’entreprise en 2015, grâce à un financement d’amorçage de 100.000 euros.
En quelques mois, l’appli, qui promet de pouvoir se faire livrer n’importe quel produit à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit, est utilisée par 10.000 personnes, ce qui lui permet de lever 1,5 million d’euros dans la foulée.
Depuis, le service s’étend très rapidement et devrait être opérationnel dans une douzaine de villes espagnoles d’ici à la fin de l’année. Le même modèle devrait être appliqué à la France, où pour l’instant seul Paris est opérationnel, comme le laisse entendre Oscar Pierre : « Nous n’avons pas encore de calendrier précis, mais nous avons démontré que nous savions opérer plusieurs villes dans un même pays… » Jacky Abitbol, associé chez Cathay Innovation, précise tout de même le timing : « L’idée est de sécuriser l’activité à Paris avant de l’étendre au reste de la France, ce qui prend en général un ou deux ans. »
Pour assurer une offre la plus large possible, Glovo noue des partenariats avec des enseignes, comme Carrefour, Bio c’ Bon, Fnac ou The Body Shop en France. Leur nombre exact n’est pas dévoilé en France, mais elles seraient plus de 3.000 réparties entre les trois pays. Les enseignes peuvent soit vendre au travers du réseau Glovo, soit intégrer directement le service via son API. Dans tous les cas de figure, le modèle change et le prix s’ajuste de manière automatique, assure son fondateur : « Nous nous accordons d’abord sur la mission à effectuer et ensuite sur un moyen de rémunérer le service. Cela peut être un partage de la marge ou un coût supplémentaire pour le client final. »
130 personnes travaillent directement pour l’entreprise espagnole à ce jour, mais ce sont 2.500 livreurs, dont 500 en France, qui effectuent la partie visible de l’activité. Baptisés « Glovers », ils ne sont pourtant pas salariés, mais autoentrepreneurs. Un sujet tendu en France, auquel le startuppeur répond en leur donnant la possibilité de travailler sur des amplitudes horaires plus élevées et en les obligeant à s’assurer, mais sans le prendre à sa charge.
A l’avenir, Oscar Pierre envisage d’étendre sa plate-forme de livraison à de nouveaux services, comme « tout ce qui touche de près ou de loin au courrier par exemple », et pourrait bien venir concurrencer, au-delà des start-up comme Deliveroo, des acteurs bien plus établis comme La Poste.