Se Nourrir De Plantes Comestibles
Si on veut vivre en tant que chasseur-cueilleur, faut-il faire des stocks l’été pour survivre l’hiver ? Ou alors trouve-t-on des plantes sauvages comestibles toute l’année ?
Cette question m’a été posée dernièrement par un lecteur et je vais tenter d’y répondre dans cet article et cette vidéo « (sur)vivre avec les plantes sauvages comestibles toute l’année »
Bien-sûr, la réponse dépend de l’endroit où on se trouve. Je vais parler de mon point de vue : du centre de la France, donc du climat d’une grande partie de l’Europe. Chez nous le climat est modéré, et – en tout cas depuis quelques années – il est rare d’avoir de grands froids l’hiver.
Cueillettes de printemps
On va commencer au printemps où la nature est tellement abondante que l’on ne sait plus où donner de la tête quand on aime les plantes sauvages. Les cueillettes que l’on va faire à cette époque sont essentiellement constituées de feuilles. En cette période de l’année elles sont bien tendres et plus douces qu’en été. Il s’agit des jeunes feuilles de plantes herbacées, mais aussi les feuilles de nombreux arbres comme l’aubépine, le tilleul, le hêtre, le merisier etc.
On trouve également une multitude de fleurs comestibles qui peuvent varier les cueillettes. Et en plus des feuilles, certaines tiges sont juteuses et croquantes (grande berce, cerfeuil des bois, bardane…).
Cueillettes d’été
Plus on avance vers et dans l’été, plus les feuilles vont gagner en amertume et devenir de plus en plus coriaces. Mais on peut toujours en manger de nombreuses.
Et après les premières fauches, de jeunes feuilles repoussent. De ce fait on peut se régaler de salades de pissenlit et de feuilles de plantain toute l’année.
Il n’y a qu’après plusieurs semaines de sécheresse qu’il peut devenir difficile de se mettre de bonnes feuilles sous la dent…
Mais c’est l’époque où on commence à trouver des fruits et des graines qui sont des concentrés de nutriments. Ainsi que certaines fleurs qui permettent d’égayer les repas par leur couleur (coquelicot, bleuet, mauve…) et leur arôme (reine des prés, mélilot, fenouil…).
Cueillettes d’automne
Après les premières pluies de l’automne, advient ce que j’appelle « le petit printemps » : de nombreuses plantes se remettent à former de belles rosettes de feuilles dont on peut se régaler.
C’est l’abondance au niveau des fruits (mûres, cenelles de l’aubépine, prunelles, nèfles, glands de chêne, châtaignes, fênes du hêtre etc…).
Aussi, on peut commencer à récolter les racines. Pour certaines plantes elles ont un rôle d’accumulation de réserves et sont de ce fait charnues et riches en nutriments (carotte, panais, pissenlit, bardane, berce, salsifis, campanule raiponce…).
Cueillettes d’hiver
Ces mêmes plantes continuent à être disponibles l’hiver mais les fruits et graines deviennent de plus en plus rares.
Les racines constituent une bonne source de nutriments en hiver. Il peut être utile de marquer leur emplacement pour mieux les repérer.
Et à condition que l’hiver reste clément, on trouve toujours des rosettes de feuilles (pissenlit, plantain, pâquerette, berce…) pour agrémenter ses salades et préparer des soupes.
L’hiver dernier, je me suis lancée le défi d’écrire un article par semaine sur une plante qui se récolte et se mange en automne et hiver. J’y suis parvenue !
En fin d’hiver on sent que le printemps se prépare, il suffit de quelques rayons de soleil pour voir les plantes de printemps se pointer (mâche, violette, primevère…).
Climats plus froids ou plus chauds
Bien-sûr, dans des régions où il neige ce n’est pas la même chanson. Sous un manteau de neige qui s’installe pendant plusieurs semaines il va être plus difficile de trouver à se nourrir.
De même, dans les régions du sud de l’Europe, plus chaudes et plus sèches l’été, on peut trouver un cycle inversé par rapport à celui de l’Europe Centrale. La nature y est abondante en hiver et il devient plus difficile de se nourrir de cueillettes l’été où les plantes manquent d’eau.
Un territoire assez grand
J’ai également constaté par mes cueillettes hivernales (pourtant limitées à un simple apport complémentaire à notre alimentation) qu’après plusieurs passages sur le même chemin, il vaut mieux étendre ton périmètre de cueillette pour ne pas « tout raser »…
Pour nourrir toute une famille en plantes sauvages comestibles il faut un territoire assez grand afin de laisser la nature se régénérer et assurer ses récoltes pour toute l‘année.
Du temps pour les cueillettes
De plus, nourrir toute une famille rien qu’avec des plantes sauvages demande énormément de temps de cueillette et de préparation. Pour ces trois raisons (grandeur du territoire, variations du climat et temps de cueillette), je conclus qu’il était effectivement intéressant de compléter l’alimentation grâce à la chasse à l’époque préhistorique.
Ces réflexions m’ont donné envie de chercher des informations plus précises sur l’alimentation et le mode de vie des hommes dans nos régions avant l’invention de l’agriculture. Je vous en reparlerai à l’occasion.
Robert Greenfield : se nourrir 365 jours uniquement de son jardin et de cueillettes sauvages
J’ai suivi l’expérience de Robert Greenfield, un américain qui, pendant une année entière, s’est nourri uniquement des récoltes de son propre jardin et de cueillettes sauvages. Il n’achetait aucun aliment et refusait même les cadeaux de nourriture. Son seul moyen de déplacement était un vélo.
Il a réussi à tenir ainsi pendant 365 jours et décrivait ses joies et ses peines. Une de ses difficultés majeures était de devoir consacrer la plus grande partie de son temps à la culture, la cueillette, la préparation et la conservation de sa nourriture. Pourtant il a fait cette expérience au sud des Etats Unis, dans un climat clément avec une végétation abondante.
(Sur)vivre avec les plantes sauvages comestibles toute l’année
Vivre toute une année uniquement de cueillette (et de chasse) dans le paysage urbanisé et voué à l’agriculture intensive que nous connaissons, ne doit pas être une mince affaire… Si vous entendez parler d’une telle expérience, n’hésitez pas à m’en faire part !
En attendant, je trouve très important de préserver et de raviver la connaissance des plantes sauvages comestibles qui constituaient la nourriture de base de nos ancêtres.
Encore il y a quelques décennies, les plantes sauvages comestibles constituaient un apport régulier à l’alimentation de beaucoup de foyer et il serait dommage, voire dangereux, de perdre ces savoirs…