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Astuces Naturelles

Quels Poissons Consommer, Sans Risque Pour La Biodiversité?

S’il est possible d’acheter certains poissons sans mettre en danger des espèces, d’autres sont dans un état critique.

Poissons vendus à Athènes

En cette période de l’année, les journées internationales concernant la vie marine s’enchaînent. Le 2 mai, le thon est à l’honneur. Le 21 mai, c’est au tour des poissons migrateurs.

Le lendemain, plus globalement, c’est la journée de la diversité biologique. Puis le 8 juin, ce sera celle de l’océan. À chaque fois, un constat: la pêche représente un véritable fléau pour de nombreuses espèces. Selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation), seuls 65% des ressources halieutiques mondiales sont viables, un minimum historique.

Et en même temps, les autorités sanitaires insistent pour dire qu’il est important de consommer du poisson pour être en bonne santé. Pour concilier ces deux préoccupations, plusieurs associations ont établi des listes pour savoir quels stocks étaient les moins sous tension et inversement. Explications sur ce qu’il vaut mieux consommer ou pas au rayon poissonnerie.

La bonne espèce, le bon endroit, la bonne pêche

Avant de présenter cette fameuse liste, quelques éléments de contexte. Au sein d’une même espèce, les stocks peuvent être parfois critiques dans telle zone de la planète et pas dans d’autres.

C’est le cas du saumon atlantique, l’un des poissons préférés des Belges, qui se fait particulièrement rare en Finlande à cause des filets maillants. Un exemple qui montre d’ailleurs l’importance du mode de pêche. Certaines pratiques sont plus durables, à l’instar de la pêche à la ligne, et d’autres très destructrices, comme ces fameux filets maillants dérivants (FMD) qui sont d’ailleurs surnommés les “murs de la mort“.

Autres techniques controversées: celles qui râclent le plancher marin comme le chalut de fond, ce “bulldozer de la mer” utilisé notamment pour le cabillaud, un des autres poissons stars en Belgique.

Autre précision: l’aquaculture peut représenter une alternative durable, mais pas toujours (à cause de l’utilisation d’antibiotiques, de pesticides, impact divers sur les écosystèmes, etc.).

Si on reprend l’exemple du saumon, les cages à filets en mer sont bien vues par WWF quand cette méthode est labellisée. Sans cela, l’organisation recommande d’en limiter l’achat pour les élevages européens, voire de l’éviter dans le cas du Chili.

Si pour un poisson donné les stocks sont suffisants dans plusieurs régions du monde, logiquement, il vaut mieux choisir celle la plus proche. La pollution résultant du transport de la marchandise sera ainsi limitée et la planète vous remerciera.

La saisonnalité des poissons sauvages

Pour les poissons pêchés en milieu sauvage, il existe également souvent des saisons pour les consommer. En cause: les périodes de reproduction, qui varient à nouveau en fonction de l’espèce et de la zone concernée.

Par exemple, Bruxelles-Environnement précise que pour la dorade grise (ou griset), la saison s’étend de la fin mai à début novembre. Pour le maquereau, c’est de juillet à février. En Méditerranée, le thon rouge est à consommer de juin à août. Les poissons élevés en aquaculture ne sont généralement pas concernés car leur reproduction est contrôlée.

Les labels

Il existe une myriade de labels pour les poissons que l’on peut classer en deux catégories: ceux qui concernent la pêche et ceux qui concernent l’aquaculture. Pour les premiers, le plus connu est le label MSC (Marine Stewardship Council), conçu à l’origine par le WWF et par la multinationale Unilever. Depuis, l’organisation MSC est devenue indépendante et est accusée de “greenwashing” ces dernières années, y compris par des membres de WWF. Il existe des alternatives, à l’instar du label “Friends of the Sea” mais là aussi, WWF estime que cette certification est décevante, malgré l’existence d’une série de critères dans tous les domaines d’évaluation. L’ONG lui préfère encore le label MSC. Plus convaincant encore: le label “Naturland”, qui combine des exigences environnementales et socio-économiques. WWF le “recommande vivement”, malgré quelques défauts.

Pour l’aquaculture, outre “Naturland” et “Friends of the Sea”, il existe le label bio de l’UE. Avec lui, les pesticides, les produits OGM et les hormones de croissance sont interdits. Mais il reste critiqué par le WWF sur le manque de critères pour protéger la biodiversité. L’ONG lui préfère le label ASC (Aquaculture Stewardship Council) qui certifie notamment l’existence de normes sociales et écologiques minimales pour les installations aquacoles.

En France, il y a aussi le Label Rouge et le sigle “Pavillon Français”. Tous deux sont critiqués par Greenpeace. Pour le premier, l’association fait savoir qu’il “porte sur la qualité du produit, mais n’est pas une garantie de durabilité“. Quant au deuxième, il “indique simplement les produits pêchés par des navires au pavillon français“.

La liste des poissons

Maintenant, passons au vif du sujet: quels poissons consommer exactement pour un impact minimal sur la biodiversité? Pour cela, nous décortiquons ici les informations données par le “Fish Guide” du WWF. Ce dernier donne trois mentions différentes pour la consommation de poissons: bon choix, avec modération, et à éviter.

L’organisation distingue aussi les stocks des différentes zones de pêche pour identifier celles où les stocks d’une espèce sont en état critique.

À éviter

Certains poissons et crustacés sont classés “à éviter” dans tous les cas, quelque soit la zone de pêche. C’est le cas de l’anguille (qui est en danger critique d’extinction), de la crevette grise (dont la pêche entraîne de nombreuses prises accidentelles voire la disparition de certaines espèces), de la crevette rose (idem), du grondin (idem), de la raie (dont les 13 espèces européennes sont pour la plupart sur la liste rouge de l’UICN), et du requin (dont la disparition serait catastrophique au vu de son rôle essentiel dans la chaîne alimentaire).

Pour le reste, presque toutes les espèces sont sous tension dans au moins une région maritime. Pour avoir la liste complète, il faut consulter le “Fish Guide” du WWF.

Citons néanmoins parmi eux le cabillaud et le saumon, qui représentent plus de la moitié du total des poissons consommés en Belgique. Il faut ainsi éviter le cabillaud de l’Atlantique Nord et du Pacifique (sauf exceptions, notamment avec des méthodes de pêche moins invasives dans l’Atlantique du Nord-Est), le saumon pacifique russe, le saumon atlantique finnois pêché par filet maillant et celui chilien.

On peut aussi évoquer, entre autres, les anchois de Méditerranée et de Mer Noire pêchés par chalut pélagique à panneaux, le calamar de Méditerranée et de Mer Noire, les coquilles Saint-Jacques sauvages (sauf pêchées à la main), le hareng du Canada pêché à la senne, le homard (sauf en Suède, Angleterre et Écosse), la langoustine des eaux européennes (sauf en Suède ou ceux pêchés avec des pièges en Atlantique Nord-Est), le merlan de l’Atlantique Nord-Est (sauf avec pêche à la ligne, à la traîne ou avec une canne), les moules de Méditerranée et de Mer Noire pêchées à la drague, le thon rouge (sauf pêche à la canne, à la ligne ou avec des pièges), ou encore la truite arc-en-ciel turque et sud-américaine.

Avec modération

Pour les deux poissons préférés des Belges, des stocks sont moins sous tension malgré quelques signes de faiblesse. Concernant les cabillauds, une consommation modérée est possible pour ceux venus du Canada (pêche à la canne ou à la ligne), de la mer de Norvège, Barents et Baltique Est, et de la mer de Béring (pêche au chalut à panneaux démersaux). Les cabillauds aquicoles élevés en Europe ou pêchés par cages à filets en mer tombent également dans cette catégorie.

Pour ce qui est du saumon, celui atlantique est à consommer avec modération quand il a été pêché dans la Baltique, en Finlande et en Norvège par piège, palangre ou filets tournants. On trouve ici aussi l’aquaculture européenne et les cages à filets en mer sans le Label Organic.

Le saumon pacifique est à limiter quand il est pêché au Japon et au Canada par piège ou filet maillant.

Un seul spécimen se retrouve uniquement dans cette recommandation “avec modération”: l’écrevisse rouge. Il existe également une dizaine d’espèces qui ne sont jamais classées dans la catégorie “bon choix”. Le mieux est donc de les choisir dans ces zones où ils sont à consommer avec modération.

On y trouve la barbue de la mer du Nord (pêchée par filet maillant de fond), la dorade royale d’aquaculture, d’Atlantique du Nord-Est (avec pêche en filets tournants, à la ligne, à la canne ou par piège) et de Méditerranée (par ligne, canne ou piège), le homard de Suède, Angleterre et Écosse, la limande sole d’Islande (par senne danoise ou filet maillant de fond) et de mer du Nord (par filet maillant de fond), le panga du Viêtnam, le rouget barbet de mer du Nord (par ligne ou canne), le thon rouge d’Atlantique Nord-Ouest et Méditerranée (par piège, canne ou ligne), la sole portugaise (filet maillant de fond), de mer du Nord et de Baltique (filet maillant de fond, chalut à panneaux démersaux et filet trémail), la plie de la Manche et de Baltique (par filet maillant de fond) ou d’Islande et de mer du Nord (par filet maillant de fond, senne danoise et écossaise, et chalut à panneaux démersaux), la lotte (ou baudroie) d’Islande (par filet maillant de fond ou chalut à panneaux démersaux) ou de péninsule ibérique (par filet maillant de fond, chalut à perche ou palangre de fond), et enfin l’églefin de mer de Barents et de Norvège (par palangre de fond, chalut à panneaux démersaux, ou filet maillant de fond) ainsi que d’Islande, Écosse de l’ouest, d’Irlande et de mer du Nord (par senne danoise, palangre de fond, chalut à panneaux démersaux ou filet maillant de fond).

Bon choix

Les amateurs d’huîtres peuvent être contents: selon le WWF, il n’y a jamais de tension sur leurs stocks, dans n’importe quel cas, tout comme le peu connu omegabaars (ou bar Oméga, élevé typiquement en aquaculture en Belgique). Seul bémol: les huîtres sont parfois récoltées par dragage, “ce qui détruit complètement les habitats du fond“, note le WWF. “Lorsque les huîtres sont élevées sur des cordes, l’impact environnemental est minime“.

Pour le cabillaud, pas de chance car il n’y a aucune zone épargnée par la surconsommation. Il faut donc se reporter sur les stocks à consommer avec modération. Pour le saumon, c’est un peu différent. Celui atlantique ne pose pas de problème quand il est labelisé, à condition qu’il provienne soit de l’aquaculture, soit de la pêche en Europe par cages à filets en mer. Pour le saumon pacifique, il est possible de se tourner vers les stocks néozélandais (aquaculture ou cages à filets en mer) ou d’Alaska (senne, filet maillant pélagique, et pêche à la traîne).

Encore une fois, difficile de faire toute la liste ici pour les autres poissons et crustacés.

Parmi eux, citons au moins l’existence de stocks suffisants pour les anchois du Golfe de Gascogne (pêchés

par chalut pélagique à panneaux et par senne), la barbue de mer du Nord (filet maillant de fond),

le bar de l’Atlantique Nord-Est (ligne et canne), le calamar de la même région (pêché à la turlutte),

la coquille Saint-Jacques de Norvège (à la main) et du Japon (aquaculture), le crabe royal rouge de mer

de Barents et d’Alaska, les crevettes tropicales d’aquaculture à condition d’être labélisées (sinon

seulement celles européennes avec un système aquacole RAS, ou vietnamienne et indonésienne avec une

production extensive), le flétan européen (en aquaculture dans des bassins), le hareng américain (senne)

et d’Atlantique Nord-Est (chalut pélagique à panneaux, senne et pièges), la langoustine de l’Atlantique

Nord-Est (par piège), le lieu jaune d’Irlande, du Royaume-Uni et de France (pêche à la traîne), le lieu

noir d’Islande, de mer de Barents et de Norvège (filet maillant de fond, palangre de fond, senne),

le maquereau d’Atlantique Nord-Est (canne, ligne, pêche à la traîne), le merlan du Golfe de Gascogne et

portugais (ligne, canne, pêche à la traîne), le merlu du Pacifique Nord-Est (chalut pélagique à panneaux),

la moule d’aquaculture (sauf d’Allemagne et des Pays-Bas) et pêchée à la main en Norvège et Nouvelle-

Zélande, la perche du Nil du Lac Victoria labelisé Naturland, le poulpe de la Manche (par piège), du

Mexique et du Sénégal (canne, ligne, chalut pélagique à panneaux), la sardine du Golfe de Gascogne, du

Maroc et de Mauritanie (senne, chalut pélagique à panneaux), le tilapia d’Europe du Nord (aquaculture

avec systèmes de recirculation) et d’Asie du Sud-Est (aquaculture en étangs), le sébaste de la mer de

Barents et de Norvège (chalut pélagique à panneaux), le thon jaune du Pacifique pêché à la ligne ou à la

canne (sauf en Alaska et Amérique du Sud), le thon blanc de régions très diverses dans le monde mais

notamment celles d’Atlantique du Nord-Est (par pêche à la traîne, chalut pélagique en bœuf, ligne et

canne), le thon rose dit listao lui aussi dans diverses régions du monde dont la plus proche est

l’Atlantique Nord-Ouest (pêche à la canne et ligne), le tourteau de Suède (par piège), la truite arc-en-ciel finnoise et suédoise (aquaculture avec cages à filets en mer, bien que leur impact écologique soit non

négligeable) ou danoise et suisse (aquaculture en étangs et bassins avec systèmes de recirculation), et

enfin le turbot européen (aquaculture avec systèmes de recirculation).

Marion

Fondatrice du blog - Solutions Alternatives

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